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Journal d'un Jeune Prêtre
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20 octobre 2009

Mardi 20

tombe46webpl1



On a enterré un mort aujourd’hui. Un gars qui s’est tué en voiture. Il s’agissait d’un gamin d’une vingtaine d’années. Je n’ai pas eu le temps de voir son visage entre la famille nombreuse qui l’entourait et les préparatifs. Durant la cérémonie, mon regard s’est porté vers la mère. Elle était toute vêtue de noir, elle portait des lunettes de soleil afin de masquer ses yeux. Rien d’exceptionnel mais je pouvais entendre sa souffrance à travers les petits cris stridents. Le père du gamin ( ou un ami, je ne sais pas ) tentait de la maintenir debout car elle semblait au bord de l’effondrement. Je n’ai pas bougé, je me suis résigné à faire ce que je fais  habituellement : Prêtre. C’est une vocation parfois difficile ( surtout lorsque je m’occupe d’un enterrement ) on travaille sous la pluie ou dans le froid, on côtoie la souffrance des gens.   Heureusement, au cimetière, j’ai quelques assistants qui m’aident. Il y a le vieux Raymond et André. Raymond veille au respect du règlement du cimetière et occasionnellement,  à l’entretien des tombes. André est plus robuste, il démonte les petits monuments, il procède parfois au creusement des fosses, aux exhumations ou aux "réductions" de corps. Il est un peu en retard mentalement mais il est rapide et efficace.

Je m’appelle Jonas et  j’ai 35 ans. Cela surprend souvent parce que je suis jeune. Les clichés, sûrement… Dans l’imaginaire collectif, un prêtre est vieux. Cela peut paraître curieux mais je le suis d’une certaine manière. Et puis, dans ce métier, je crois qu'il vaut mieux être vieux. Raymond a 71 ans. Il est à la retraite. Depuis qu’il a perdu sa femme morte d’une leucémie, il ne supporte plus de rester seul chez lui sans rien faire. Comme c’était un ami de mon père, je lui ai proposé de venir m’aider de temps en temps. Je pense que ça lui plaît. Il voit du monde, il parlemente avec les familles de défunts, il me fait la conversation. Je l’invite parfois à dîner. C’est un brave homme, je l’aime bien et je crois que c’est réciproque. Tout comme Raymond, André est un employé communal. Mais contrairement à Raymond, André parle peu, il préfère effectuer son travail habituel loin des conversations ou des regards. Il a 24 ans. Comme je l’ai dit plus haut, il accuse un  retard mental depuis sa naissance. C’est tout ce que je sais de lui. 

J’aime ce « métier ». Il m’apporte une certaine joie. Je ne suis pas d’une nature triste. La douleur des familles m’afflige souvent même si, au fond, avec le temps, j’ai appris à me fabriquer une sorte d’armure.

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